Et si c’étaient surtout les questions d’environnement local qui posaient problème dans l’exploitation des gaz et pétroles de schistes? A commencer, bien sûr, par l’emprise au sol.
Pour exploiter une réserve de gaz conventionnel, il faut au plus un puits tous les 10 km2. Pour exploiter le gaz de schiste, il faut au moins un puits tous les km2. Et ces puits nécessitent davantage de surface au sol que les puits conventionnels. Il faut de la place pour stocker l’eau qui va servir à fracturer la roche, et pour récupérer, dépolluer et recycler celle qui revient. Les installations s’étalent sur xx hectares en moyenne, contre xx seulement pour le gaz conventionnel. Bref, il faut en gros cinquante fois plus d’emprise au sol pour le gaz de schiste. On peut en voir l’effet sur Googlemaps, par exemple au Texas.
Les conséquences sont fortes: destruction difficilement réversibles de terrains naturels ou agricoles, mitage du paysage, circulations très importantes de camions, bruits, lumières intempestives, fumées et polluants atmosphériques… en tout cas durant la période – quelques semaines – de fracturation hydraulique proprement dite. Les nuisances sont quand même moindres durant les quelques années d’exploitation qui suivent.
Du moins sous la forme qu’elle a prise aux Etats-Unis, l’exploitation des gaz et pétrole de schiste apparaît bel et bien porteuse de nuisances considérables. D’un point de vue économique, elle paraît difficilement compatible avec un développement territorial basé, dans de nombreuses régions de France, sur le tourisme et une agriculture visant la qualité et le respect de l’environnement (si on passe sous silence l’addiction française aux produits phyto-sanitaires et aux engrais, mais c’est une autre histoire).
Le rapport parlementaire Gonnod Martin de juin 2011 suggère pourtant que cet emprise au sol est peut être moins fatale qu’il n’y paraît. Les progrès constants du forage horizontal et le regroupement de nombreux forages en étoile autour d’un même emplacement pourrait permettre de réduire considérablement l’emprise au sol et les dommages collatéraux. Aux Etats-Unis, un autre facteur pousse au morcellement des sites en surface: le fait que les propriétaires du sol soient également propriétaires des ressources du sous-sol, alors qu’en France l’Etat est seul propriétaire du sous-sol.
Vu l’importance des problèmes d’environnement local, il semble évident que la décision d’exploiter ou non des ressources potentielles en gaz et pétroles de schistes devrait impérativement associer les territoires, et ne sauraient être du ressort exclusif de l’administration centrale. Une conséquence possible est bien sûr que certaines régions pourraient décider d’aller de l’avant et d’autres non.