Tous les pays peuvent atteindre des fortes proportions d’électricité éolienne et photovoltaïque de façon économique – c’est l’AIE qui l’affirme dans une étude parue ce mercredi 26 février, « The Power of Transformation ». Une étude qui remet bien des idées en question – et les pendules à l’heure.
L’énergie éolienne et le solaire photovoltaïques sont cruciaux pour répondre aux besoins énergétiques en décarbonisant le secteur de l’électricité. Mais la variabilité inhérente au vent et au soleil inquiète. L’étude de l’AIE montre que l’intégration de 30% de vent et de soleil PV (en énergie annuelle), voire davantage, ne coûterait pas beaucoup si on s’y prend bien – cela dépend de la flexibilité déjà présente dans les systèmes, et de la façon dont on la développe.
« Il ne s’agit pas d’ajouter seulement des éoliennes et des toits solaires au système, explique Simon Mueller, principal auteur de l’étude, il faut le transformer pour que cela soit économique. Si la tâche semble plus difficile dans les systèmes « stables », où les besoins de capacités nouvelles ou de remplacement sont faibles, c’est le prix à payer de la décarbonisation, et non pas un prix spécifiquement dû à la variabilité de certaines énergies renouvelables. »
Pour intégrer les variables, il faut d’abord les mettre elles-mêmes à contribution, c’est-à-dire assurer un développement qui minimise les difficultés pour le reste du système, qu’il s’agisse des réseaux de distribution et transport, ou des autres capacités génératrices. Donc, éviter de concentrer trop d’installations là où le réseau est trop faible, mais au contraire les répartir de façon à bénéficier du réseau existant, mais aussi de la diversité des ressources – par exemple des régimes de vent. Il faut aussi jouer sur la complémentarité des diverses ressources – le vent souffle souvent plus fort en hiver et la nuit, le soleil brille surtout au printemps et en été, et bien sûr le jour… Les nouvelles éoliennes peuvent avoir un ratio surface balayée sur capacité électrique plus élevé, ce qui évite les pics de puissance trop important et permet de fournir une électricité plus régulière – et d’installer les éoliennes sur une plus grande diversité de sites, et pas forcément sur les sites les plus sensibles du point de vue des paysages (crêtes de montagne, bords de mer). La baisse considérable des coûts du PV permet de concevoir des installations avec une exposition double, et pareillement un ratio DC (modules) sur AC (puissance délivrée sur le réseau) plus élevé, et un output plus régulier.
Une autre dimension est relative à l’utilisation optimale de la flexibilité existant dans les systèmes électriques. Elle nécessite un usage intensif de la prévision météo, et des marchés « rapides » à temps de réaction courts. Il convient ensuite d’augmenter toutes les flexibilités – interconnections, gestion dynamique de la demande, génération flexible, et enfin stockage. Contrairement à une idée largement répandue, l’augmentation des capacités de stockage (aujourd’hui massivement les stations de transfert d’énergie par pompage hydraulique) n’est pas toujours nécessaire quand on vise de 30 à 45% d’énergie annuelle des renouvelables variables. Par ailleurs, lorsqu’elle deviendrait vraiment nécessaire, une telle augmentation ne nécessite aucune innovation technologique radicale: l’extension des capacités de stockage hydraulique n’est pas un problème lorsque le modèle d’affaires le justifie (voir ici).
Le parc de capacités fermes, hydrauliques ou thermiques, doit être progressivement adapté à l’intégration des variables. Il y a deux questions qu’il faut bien distinguer: les problèmes techniques, et les questions économiques. Techniquement, on peut aller assez loin si on retire progressivement les capacités les moins flexibles. Economiquement, le problème est celui des taux d’utilisation, qui se réduit à mesure que la contribution des variables augmente. Au final, on a un parc (hors renouvelables) qui comprendra nécessairement plus de capacités de pointe, et moins de capacités de base. L’électricité de pointe étant plus chère que celle de base, le coût moyen du kilowattheure non renouvelable augmentera, cela n’est pas discuté.
Mais l’augmentation des coûts totaux, qui pourrait atteindre 40% si par hypothèse on greffait subitement 45% de renouvelables variables sur un système inchangé, serait limité à 10% à 15% si le système est progressivement transformé pour les accueillir. Encore faut-il noter que cette évaluation est faite à coûts constants desdites variables. Or leur expansion serait liée en toute hypothèse à des réductions de coûts. Un système avec 30 à 45% de variables pourrait en définitive ne rien coûter de plus – voire coûter moins cher.
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