« En France, le solaire ne fonctionne que 14 % du temps, et l’éolien 23% », a déclaré Jean-Bernard Lévy aux Echos, en présentant les objectifs d’EDF à l’horizon 2030 – doubler la capacité installée française en énergies renouvelables. JB Lévy fait là allusion au « facteur de capacité », qui exprime la production électrique d’une installation en un nombre d’heures « équivalent pleine puissance » (en pourcent des 8760 heures d’une année) – une simplification sans doute, pour se faire facilement comprendre du plus grand nombre, malheureusement trompeuse.
A double titre: 1) la production réelle est répartie sur un bien plus grand nombre d’heures; 2) le facteur de capacité des éoliennes récentes est bien supérieur, même dans les régions modérément ventés, il atteint 35 ou 40%. C’est dû à leur grande hauteur de mat et surtout leurs longues pales par rapport à leur une capacité électrique. Voir par exemple les derniers modèles révélés à la conférence éolienne d’Husum, en Allemagne, avec des diamètres de rotor de 130 à 140 mètres pour des capacités de « seulement » 3,2 à 3,5 MW.
1+2: les éoliennes modernes produisent (plus ou moins, c’est entendu) les trois-quarts du temps, plutôt qu’un quart du temps… Le solaire, lui, ne peut dépasser ni même atteindre la moitié du temps, mais on peut aussi améliorer son facteur de capacité avec le suivi du soleil ou une orientation est-ouest des panneaux plutôt que sud, comme à Cestas.
Par ailleurs… Ceci vaut pour les éoliennes prises individuellement. Mais pour les éoliennes prises collectivement… eh bien, il y en a toujours qui fonctionnent. Et même avec une forte pénétration, on peut considérer en Europe un crédit de capacité d’encore 20%, c’est-à-dire qu’à tout moment, pour 5 GW de capacité installée, il y a bien 1 GW de disponible, selon l’étude d’EDF dont je parle ici (réalisée avec des facteurs de capacité faibles par rapport à ce qui se fait maintenant). Mais bon, les petits nouveaux à EDF ne peuvent pas connaître tout de suite tout ce que cette vaste maison produit.
« Tant que nous ne sommes pas capables de stocker l’énergie, nucléaire et renouvelables sont complémentaires », a conclu le patron d’EDF. Là encore, c’est beaucoup simplifier. EDF sait fort bien stocker l’énergie – pour quelques heures ou quelques jours, pas vraiment d’une saison à l’autre – dans ses stations de transfert d’énergie par pompage – 5 000 MW, et on peut en faire d’autres. Et surtout, le besoin réel de stockage est bien moins important qu’on ne le pense, et d’abord parce que la production renouvelable est mieux répartie dans le temps qu’on ne le croit – ou le dit.
Encore faudrait-il rémunérer correctement les bons profils de production. Les tarifs d’achat pour l’éolien et le photovoltaïque ont un plafond d’heures, au-delà duquel la rémunération tombe à 5 centimes du kilowattheure. La Commission de régulation de l’énergie a récemment proposé, si la ministre de l’Ecologie persiste à vouloir rehausser un peu la rémunération des installations PV de moyenne puissance, d’abaisser encore le plafond de la rémunération du PV en nombre d’heures, de 1500 à 1200 heures par an – exactement l’opposé de ce qu’il conviendrait de faire pour faciliter l’intégration des renouvelables dans le réseau.