Les ferrys électriques

Autant que le transport aérien, le transport maritime est une source importante de gaz à effet de serre – 2,5% du total du CO2 d’origine énergétique – et de polluants atmosphériques, notamment pour les habitants des ports. Les règles relatives à la teneur en soufre des carburants maritimes – gazole maritime et fioul lourd – ont bien été révisées récemment, et des zones de contrôle des émissions créées le long des côtes européennes. Cependant, la teneur en soufre dans ces zones, obligatoirement inférieure à 0,1% (« ultra-low ») reste… 100 fois plus élevée que celle du gazole routier.

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Des carburants pour voler vert

 

Certain en rêvent, mais l’avion électrique ne saurait voler loin. Le poids des batteries est rédhibitoire pour autre chose que des sauts de puces. L’avion à hydrogène, on l’a vu, n’est pas une solution à portée de la main. Faut-il pour autant renoncer à « verdir » l’avion ? Pas forcément.

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L’avion hydrogène n’est pas pour demain

En juin dernier, le gouvernement français annonçait un plan de soutien à l’aéronautique de 15 milliards d’euros, assorti de l’exigence de lancer un avion « vert » à l’hydrogène dès 2035.  Dès septembre, Airbus présentait trois concepts d’avion à l’hydrogène. Mais tout suggère que des avions à hydrogène liquide, s’ils volent un jour, n’emporteront guère de passagers avant 2050, c’est-à-dire trop tard pour réduire significativement les émissions de gaz à effet de serre. Voici pourquoi – mon analyse également exprimée sur l’excellent site Revolution énergétique sous forme d’entretien.

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A trop demander à l’hydrogène, on ne rend pas forcément service à la transition énergétique

Avec l’aimable autorisation de la rédaction du Monde, je reproduis ici le texte de ma tribune publiée sur son site le 30 Octobre et dans l’édition papier datée du 2 Novembre, dans un ensemble intitulé « Une bouffée d’hydrogène pour l’économie ». J’en profite pour remercier vivement Antoine Reverchon pour ses remarques critiques et constructives.

Pour décarboner l’économie mondiale, le recours à l’hydrogène apparaît aujourd’hui incontournable. Les industries chimiques et sidérurgiques, le raffinage, le transport maritime et
l’aviation ne sauraient se « décarboner » sans hydrogène « propre ». L’hydrogène permet aussi de faire voyager les énergies renouvelables des pays les mieux pourvus vers les autres, et de stocker assez d’énergie pour les longues périodes sans vent ni soleil – énergies qui vont dominer le mix électrique. On ne peut donc que se féliciter de voir surgir partout des plans hydrogène enfín dotés de moyens conséquents.

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Le train à hydrogène n’est pas un must

Si l’essentiel du trafic ferroviaire en France est électrifié, environ 20% serait encore « thermique », avec des locomotives ou des trains automoteurs roulant au gazole, selon l’évaluation du député Benoît Simian de fin 2018. Un quart des matériels roulants ont des moteurs diesel, notamment près de mille trains TER bimode ou seulement diesel, et la moitié des lignes ne sont pas électrifiées. La pollution est importante, oxydes d’azote, monoxyde de carbone, particules fines, et bien sûr dioxyde de carbone, donc des effets locaux, régionaux et globaux. Impossible de s’en tenir là, et d’imaginer que ces matériels seront renouvelés à l’identique.

Pour Benoît Simian, pour le Conseil de l’hydrogène, et pour beaucoup d’autres, l’hydrogène est la solution évidente. Deux trains Coradia Ilint d’Alstom circulent depuis septembre 2018 en Allemagne, d’autres sont en construction. Le matériel existe donc.

Et pourtant… Pourtant, des alternatives autant sinon plus écologiques existent, et pourraient s’avérer moins coûteuses. Notamment l’électrification « frugale », et l’ammoniac.

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Déconfits-nés: la ville du quart d’heure et le climat

Comment penser les transports urbains – métro, bus, vélo, voitures… – et au-delà le travail, le logement, les loisirs, bref, l’urbanisme dans le contexte du déconfinement, et sans perdre de vue, bien au contraire, nos objectifs climatiques? Je prête ici mes modestes colonnes à mon ami Denis Bonnelle, économiste et physicien, esprit curieux et inventif passionné d’énergies renouvelables en tous genres. Il a bien voulu rassembler  une suite de mails que j’ai trouvé très intéressants en en un article unique… que j’aurais aimé avoir écrit car j’y souscris sans réserves!

« Dans une semaine, les transports en commun reprendront avec des contraintes strictes de distance interpersonnelle de 1 m, c’est-à-dire, dans les plus grandes villes, en transportant de l’ordre de 20 % du nombre de voyageurs habituels en heure de pointe (sans compter que l’offre de trafic ne sera que de 70 % à la RATP). À première vue, ça ressemble à une mauvaise nouvelle pour le climat : toujours cette difficulté à convaincre que 2050, c’est une véritable urgence et qu’on ne doit pas perdre une minute – ou, en tout cas, pas une occasion de faire bouger les lignes. Continuer la lecture

Temps de travail…

Le patron du Medef a déclaré qu’il fallait « réfléchir au temps de travail ». Excellente idée! A l’heure où tout le monde ne parle que de relance, où les plus libéraux se réveillent keynésiens, « quoi qu’il en coûte », on peut se demander s’il est possible dans ce contexte de « réfléchir au temps de travail », en effet, mais non pas pour l’augmenter, comme le voudrait Roux de Bézieux, mais pour le réduire.

Ainsi, outre le choix entre une relance « tous azimuths » ou une relance sélective qui mettrait à profit les énormes stimuli économiques pour accélérer, plutôt que freiner, la transition écologique, se pose un autre question – peut-on penser « en même temps » une relance keynésienne et le partage du travail via la réduction du temps de travail contraint? Le mieux serait de demander à Keynes lui-même.

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Le numérique consomme peu

C’est un des lieux communs de la technophobie moderne – celle qui s’entoure des oripeaux de l’écologie pour mieux combattre  la transition écologique au travers de la critique de ses outils – voir par exemple les innombrables interviews de Guillaume Pitron, auquel j’ai répondu dans l’Obs  à propos des éoliennes et du solaire (cf La transition écologique). Les datas centers, au coeur de l’économie numérique, sont des goufres énergétiques, qui consommeraient à eux seuls 2% de l’électricité mondiale et en consommeront 13% dès 2030, selon une étude de Huawei que cite l’Ademe, généralement une bonne source. Autant dire qu’imaginer que le télétravail, le courrier électronique, la digitalisation, l’internet des objets, l’intelligence artificielle et autres pourraient aider à mieux gérer les flux énergétiques et in fine, contribuer à la lutte contre les changements climatiques, ne pourrait que procéder d’une dangereuse illusion techniciste, pour ne pas dire, horreur suprême, croissantiste, à laquelle participe évidemment l’Agence Internationale de l’Energie par ses initiatives dans le domaine.

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Peut-on se passer du nucléaire – réponses à quelques critiques

La plupart des critiques concernent le facteur de capacité et le crédit de capacité des éoliennes.

En ce qui concerne le premier, les faits sont pourtant têtus: le facteur de capacité des éoliennes récentes est bien plus élevé que celui des plus anciennes, bien qu’elles soient souvent installées dans des endroits moins favorisés, comme le montre l’exemple américain. Pourquoi? Parce qu’à partir de 2013 on a installé des éoliennes avec une plus grande surface balayée pour la même puissance électrique dans des endroits mieux ventés que ceux pour lesquels ces nouvelles éoliennes « low wind speed » avaient été initialement conçues… mais quand même moins bien ventés que ceux où on installait les éoliennes en 2005 comme le montrent les graphes publiés par Wyser and Bolinger. En 2014, la zone est moins favorable qu’en 1988-2001 mais le facteur de capacité des installations est passé de 25% à 40%.

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Peut-on se passer… (version courte)

Voici le texte brut de notre tribune parue sur le site du Monde dimanche 9 février au matin, laquelle renvoie à la version longue.

« D’ici à 2050, la consommation française d’électricité pourrait atteindre 600 à 700 milliards de kWh (600 à 700 térawattheures/TWh) par an, soit 10 000 kWh par Français, contre 500 TWh aujourd’hui, selon la Stratégie nationale bas carbone (SNBC). Cette augmentation permettrait de beaucoup réduire l’utilisation de combustibles fossiles dans les bâtiments, l’industrie et les transports ; 60 TWh proviendraient comme actuellement des barrages et, pour respecter nos engagements climatiques, environ 640 TWh devraient être fournis par l’éolien et le solaire ou par le nucléaire.

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